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En ce début d'année, l'introduction des pièces et des billets en euros tiendra lieu, n'en doutons pas, de « patriotisme économique » pour nombre de nos dirigeants.
A l'autre bout du monde, oublié des puissants, un peuple lui aussi n'aura jamais tant parlé de sa monnaie. C'est dans une situation quasi-insurrectionnelle que les Argentins ont passé les fêtes, la vacance du pouvoir n'étant que le moindre des problèmes d'un pays où un habitant sur trois est au chômage, et où deux mille personnes chutent chaque jour sous le seuil de pauvreté.

En 1991, asphyxiée par l'hyperinflation, l'Argentine décidait de lier constitutionnellement sa monnaie au dollar, afin de redonner confiance aux institutions financières et aux grandes banques internationales. Au début, ce fut un succès, et Carlos Menem put passer un temps pour le premier de la classe, malgré la corruption et l'impéritie patentes du régime.
Mais en renonçant volontairement à mener une politique monétaire autonome, l'Argentine s'exposait à une extrême vulnérabilité aux chocs extérieurs et à des fluctuations brutales de l'activité, désormais entièrement soumise aux caprices des marchés financiers.

Dans le même temps, les institutions financières internationales ont adopté une politique pour le moins contestable, en maintenant pendant des années le pays sous perfusion, avant de le lâcher subitement début décembre. Par cette décision, qui fit tomber deux présidents en l'espace d'un mois sur fond d'émeutes et de pillages de supermarchés, le FMI a endossé indirectement la responsabilité de la crise actuelle.
Une première leçon doit en être tirée : les institutions de Bretton Woods, que ça leur plaise ou non, sont des institutions publiques. Elles ne peuvent plus traiter les pays membres comme des actionnaires, mais doivent se soumettre à des principes et à un contrôle démocratiques.

La deuxième leçon, c'est que la vulgate libérale et sa soumission aveugle aux mouvements de capitaux transnationaux se sont, en Argentine comme ailleurs, trouvées gravement prises en défaut. Dix ans de privatisations ont surtout été dix ans de privations, qui ont considérablement accru la pauvreté et les « sans ». Plutôt que d'engraisser les banquiers occidentaux, il faudrait donner du pain au peuple, par la mise en place d'une politique de redistribution, de type RMI, évaluée à 380 pesos par personne par les syndicats.

La dernière leçon, c'est Saint-Just qui nous la donne : « les malheureux sont les puissances de la Terre. Ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent ». C'est en ce sens que l'équipe de la République Sociale vous adresse ses meilleurs vœux ; que 2002 soit une année de victoire pour tous les nôtres…